Cette année, les Nuits de Fourvière célèbrent particulièrement la danse avec quatre spectacles en juin et une nuit cabaret, tandis qu’en juillet, Mehdi Kerkouche fera le show avec sa nouvelle création et que le circassien Yoann Bourgeois enveloppera la chanteuse Pomme de sa poésie suspendue. Un beau programme !
La transe de Hofesh Shechter
Lors de sa création en 2010, Political Mother fut un choc comme rarement vu sur la scène chorégraphique, incarnant toute la complexité émotionnelle du chorégraphe Hofesh Shechter sur une musique live – batteries et guitares électriques – avec des danseurs à la physicalité brute.
Cette pièce résume à elle seule l’univers de Shechter avec ses unissons, ses gestes collectifs qui évoquent aussi bien des ambiances de fête que la guerre, le totalitarisme et la violence idéologique qui réussit malgré tout à éprouver l’amour, le tout étant porté par des rythmes qui mènent les corps jusqu’à la transe.
Sa troupe vient aux Nuits avec une version XXL de la pièce, soit vingt-quatre musiciens juchés sur une structure métallique verticale qui surplombent la scène où quatorze danseurs et danseuses sont embarqués (et embarquent le public) dans une expérience sensorielle, radicale et galvanisante (du 2 au 4 juin).
La grâce de Benjamin Millepied
En 2022, Benjamin Millepied était venu avec sa superbe version contemporaine de Roméo et Juliette qui situait l’histoire d’amour en plein Los Angeles, filmant une danse projetée en direct sur des écrans qui nous plongeaient au plus près des corps et de la dramaturgie.
Titre de l’album culte paru en 1994 du chanteur et musicien Jeff Buckley, Grace est un hommage à l’artiste disparu à 31 ans où le chorégraphe met en scène sa fragilité comme sa créativité au travers de tableaux qui associent musiques, chants, textes, danses et images.
Avec fougue et virtuosité, dix interprètes s’emparent de ses poèmes en musique, traversés par un romantisme sombre et illuminés d’éclats de lumière. “Il y a quelque chose d’intemporel dans la musique de cet album, dit Benjamin Millepied, c’est ce qui lui permet de toucher aussi profondément toutes les générations, y compris les plus jeunes qui ne peuvent être que bouleversées par autant de beauté, de richesse et de sincérité. Cette musique est un don qui permet à ceux qui ont 20 ans aujourd’hui de vivre ce qui les entoure avec plus d’intensité.” (Les 17 et 18 juin.)

Un concert dansé explosif
L’ode à la jeunesse se poursuit avec un concert dansé unissant l’artiste Hervé qui, en trois albums, a insufflé à la pop française une énergie puisée dans les musiques électroniques et dont les pulsations soulignent des textes très personnels et MazelFreten, un collectif de danse hip-hop et électro, mené par les chorégraphes Brandon Masele et Laura Defretin, révélé en 2022 avec Rave Lucid, une rave collective hypnotique et effrénée, et plus récemment avec le tableau Obscurité de la cérémonie d’ouverture des JO de Paris 2024.
Il s’agit d’une rencontre inédite, créée récemment à Chaillot où, en marge de ses tournées, Hervé s’est retrouvé en solo sur scène avec sept interprètes incarnant ses chansons et sa musique. Tous se rejoignent dans une ambiance survoltée où la danse extrêmement énergique s’accorde aux pulsations de rythmes électroniques, invitant le public à partager une expérience inoubliable (le 24 juin).

L’immense Israel Galván avec l’Orchestre national de Lyon
Programmé l’an dernier avec le Sacre du printemps, Israel Galván nous avait une fois de plus bouleversé, révélant seul sur scène une version qui nous emmenait dans les entrailles d’un flamenco somptueusement traversé par d’autres danses dont il est imprégné comme le buto, celle de Martha Graham et de la grande danseuse espagnole La Argentina.
Il revient avec Carmen, désireux de révéler l’essence de cette icône féminine liée à Séville aussi intimement que lui et déploie l’opéra de Bizet sous forme de danse dans une version resserrée, conçue comme un dialogue intense avec l’Orchestre national de Lyon, le chœur finlandais de voix d’hommes Huutajat Oulu, les voix lyriques d’une distribution réduite à Carmen, Don José et Escamillo et la magnifique María Marín à la guitare et voix flamenca.
Proposée sur une seule date, cette rencontre s’annonce grandiose et surprenante comme tous les spectacles du maître (le 26 juin).

Le 14 juin, une nuit flamboyante : Cabaret - Drag - Voguing - Waacking
Dans le cadre de ses “Samedis des Nuits”, le festival laisse place à la fête et la démesure avec une soirée cabaret qui invite de nombreux artistes tous aussi fous les uns que les autres. Parmi eux, on pourra voir deux collectifs lyonnais que l’on connaît bien : le Lyon Ballroom Scene et le Lyon Waacking Project qui chaufferont le théâtre avec des performances autour du waacking et du voguing, des danses délirantes et extravagantes issues du clubbing. Ils seront suivis de l’équipe du célèbre cabaret de Madame Arthur, avec ses créatures incroyables pour un programme qui célèbre les légendes de la disco-pop ABBA ou encore de la musicienne électro Romane Santarelli, qui transformera la scène et le grand théâtre en dancefloor, sans oublier le collectif afroqueer Oshumaré chargé de maintenir l’ambiance du bar jusque tard dans la nuit.
Les Nuits de Fourvière – Du 2 juin au 26 juillet
Programme complet : www.nuitsdefourviere.com